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Tu quoque

La petite infanticide 

24 Décembre 2018 , Rédigé par Sébastien Cochelin

 

Ô saisons d’Ossian, ô vent de province, 
Je mourrais encor pour peu que t’y tinsses 
Mais ce serait de la démence 
Oh! je suis blasée 
Sur toute rosée 

 

Le toit est crevé, l’averse qui passe 
En évier public change ma paillasse, 
Il est temps que ça cesse 

 

Les gens d’en bas 
Et les voisins se plaignent 
Que leur plafond déteigne 

 

Oh! Louis m’a promis, car je suis nubile 
De me faire voir Paris la grand ville 
Un matin de la saison nouvelle 
Oh ! mère qu’il me tarde 
D’avoir là ma mansarde… 

 

Des Édens dit-il, des belles musiques 
Où des planches anatomiques passent… 
Tout en faisant la noce 
Et des sénats de ventriloques 

 

Dansons la farandole 
Louis n’a qu’une parole 

 

Et puis comment veut-on que je précise 
Dès que j’ouvre l’oeil tout me terrorise. 
Moi j’ai que l’extase, l’extase 

 

Tiens, qui fait ce vacarme ?… 
Ah ! ciel le beau gendarme 
Qui entr’ par la lucarne. 

 

Taïaut! taïaut ! À l’échafaud ! 

 

Et puis on lui a guillotiné son cou, 
Et ça n’a pas semblé l’affecter beaucoup 
(de ce que ça n’ait pas plus affecté sa fille) 
Mais son ami Louis ça lui a fait tant de peine 
Qu’il s’a du pont des Arts jeté à la Seine 

 

Mais un grand chien terr’ neuve 
L’a retiré du fleuve 

Or justement passait par là 
La marquise de Tralala, 
Qui lui a offert sa main 
D’un air républicain. 

 

Jules Laforgue, Premiers poèmes 

 

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